Pendant l’étude du soir (environ de 17 h à 19 h), les élèves qui souhaitaient rencontrer tel ou tel professeur (ou le supérieur) rédigeaient sur une feuille de bloc-notes un billet invariablement libellé comme suit : « Je désire me rendre chez Monsieur ……. » J’ai pour ma part connu ce système pendant les années 1963-66, dans les salles d’étude dites des « petits » et des « moyens ». Au début de l’étude, on déposait un billet sur le coin du banc, le surveillant les ramassait et les redistribuait, y notant l’heure de départ de l’étude. Le professeur chez qui on se rendait notait, lui, l’heure de la fin de l’entretien.
Cette pause avait plusieurs avantages. Elle nous permettait de nous dégourdir les jambes, nous pouvions demander des explications pour une matière qui n’était pas très bien comprise ou simplement bavarder avec un professeur que l’on appréciait.
Voyez les trois premiers billets, ils datent des années 1930. Le quatrième est plus ancien, puisque l’abbé Pieltin, qui signe l’heure du départ, a été professeur de 1894 à 1929 et que l’abbé Marloye, qui a reçu l’élève, est resté au Séminaire de 1904 à 1911.
La photo qui suit les quatre billets a été prise par l’abbé Lombet au milieu des années 60. Il habitait le pavillon carré au bout du portique, au jardin suspendu. Aujourd’hui le bâtiment menace ruine, à l’époque c’était « un des séjours les plus agréables de la terre », pour reprendre les termes de son occupant. Bel instantané : l’élève, Philippe Douxfils, a encore sa main droite sur la clenche de la porte qu’il vient d’ouvrir et tient dans sa main gauche son « billet de sortie ». Il arbore un large sourire.
Ainsi voici rappelé avec quelques modestes documents un système de communication très simple et qui a duré au moins soixante ans, probablement plus. Il ne devait pas être si mauvais que cela…
Ayant connu ce système de septembre 57 à juin 62, je me souviens que c’était parfois un élève qui procédait au ramassage des billets de visite. S’il était de leurs amis, les demandeurs en sollicitaient la faveur d’être placés en premier lieu dans le paquet. Malheureusement, c’est le surveillant qui faisait le tri par destinataire, dans un ordre qu’il déterminait. Il arrivait aussi qu’un billet soit retiré en guise de sanction envers un demandeur.
Le samedi du week-end passé au Séminaire -on ne rentrait que tous les quinze jours- la même formule était en vigueur pour les confessions, “Je désire me confesser chez Monsieur L’abbé …”. C’était une autre époque, mais sans regret!